Renault et Stellantis face à la menace chinoise
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Rester dans la course. C’est le leitmotiv des constructeurs automobiles français Stellantis et Renault. Ils viennent de publier d’excellents résultats 2023 salués par la Bourse. Stellantis a vu son chiffre d’affaires, 189,5 milliards d’euros, progresser de 6 % en 2023. Son résultat net est de 18,6 milliards d’euros. Les salariés bénéficieront de primes d’intéressement et de participation d’au moins 4 100 €. Renault, de son côté, après une année 2022 marquée par son retrait du marché russe réalise un chiffre d’affaires de 52,4 milliards d’euros (+13,1 %) avec un résultat net de 2,2 milliards d’euros.
Les Chinois en embuscade
Tout roule. Du moins en apparence. Car on construit de moins de moins en France : 2,88 millions de voitures en 2000 contre 1,38 million en 2022.
Surtout, c’est devant et non dans le rétro qu’il faut regarder. Et le plus difficile est à venir. On pourrait assister dans les mois qui viennent à une redistribution des cartes dans l’industrie automobile avec des Chinois en embuscade.
« Si l’industrie automobile ne bouge pas, elle disparaîtra sous l’offensive chinoise. Ceux qui n’auront pas fait leurs devoirs en matière de réduction de coûts sont ceux qui finiront dans le pétrin » , a prévenu Carlos Tavares, le patron de Stellantis dans un entretien accordé à l’agence Bloomberg. Celui qui a su redresser PSA puis racheter Opel et enfin fusionner avec FCA (Fiat-Chrysler) se dit prêt à réagir. Prendre le contrôle de Renault comme la rumeur a pu courir ? Ou renforcer ses positions américaines en s’attaquant à GM ou Ford ? Autant de pistes démenties par Carlos Tavares au cours d’une téléconférence de presse. « Nous n’avons pas de négociations en cours sur ce qui pourrait être une fusion majeure, et certainement pas avec Renault », a-t-il affirmé. « Une fusion réussit uniquement s’il y a une volonté des deux côtés » avait déjà souligné Luca De Meo, dans un entretien au Figaro. Ce dernier, après avoir renoncé à coter en Bourse sa filiale électrique Ampere ne ferme pas la porte à « des fusions avec certains morceaux d’activités ». Renault et Geely ont déjà créé une coentreprise pour les moteurs thermiques et hybrides.
Seule certitude, la menace chinoise est bien réelle. Dans les couloirs de la Commission européenne, l’heure est à la mobilisation pour éviter de voir des pans entiers de l’industrie automobile européenne s’effondrer sous les coups de boutoir des industriels chinois. La fin du moteur thermique signe l’irruption de ces nouveaux acteurs qui n’hésitent pas à casser les prix. « Leur part de marché est de 8 %. Elle pourrait doubler dans les deux ans qui viennent » , observe Édouard Bourcieu, chef économiste à la direction du Commerce de la Commission européenne.
Alliance dans les batteries
Tout va très vite. BYD (Build your dreams) a été créé en 1995 à Shenzen. Il vient de doubler Tesla pour les ventes de voitures électriques dans le monde. Pour faire front, Renault a fait le choix, de son côté, de s’associer avec Geely un autre constructeur chinois qui a pris le contrôle de Volvo. De nouvelles alliances émergent aussi dans le secteur stratégique de la batterie contrôlé par les fabricants asiatiques. Dans ce domaine, Stellantis, Mercedes-Benz et TotalEnergies sont associés au sein d’ACC. Un projet qui mobilisera 8 milliards d’euros de capital, dont 3 en France à l’horizon 2030.
Le virage à négocier s’annonce à hauts risques pour les constructeurs automobiles historiques. En décrétant la fin du moteur thermique à l’horizon 2035, l’Europe a fait un bond de géant vers la décarbonation de ce secteur mais aussi octroyé un cadeau à la Chine. « Les politiques n’en ont jamais discuté, mais que diront les responsables européens quand les conséquences sociales se feront sentir », regrette Carlos Tavares dans un entretien accordé au magazine Challenge.
Car la bataille s’annonce inégale. Comme elle l’avait été pour les industriels de panneaux photovoltaïques européens sabordés par leurs concurrents chinois. Les constructeurs européens dénoncent les aides accordées par Pékin à ses acteurs nationaux. La Commission vient d’ouvrir une enquête pour y voir plus clair. Et se dit prête à prendre des mesures de rétorsion le cas échéant.
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