En Suède, les biocarburants marquent une pause

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Publié le: 08/03/2007 - Mis à jour le: 08/10/2019
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P997_070308.jpgReportage. De plus en plus de voiture « flexfuel », de plus en plus de pompes vendant de l'E85... Pourtant, la consommation d'éthanol plafonne : trop cher.

STOCKHOLM (de notre envoyé spécial). - Huit pompes, toutes équipées du pistolet à tuyau bleu, réservé à l'éthanol. À Stockholm, la station-service OKQ8 est celle qui vend le plus de biocarburant. Mais, en ce froid matin de début mars, les clients se font rares. Certes, les voitures ne cessent de s'arrêter pour faire le plein. Mais pas d'E85, le « carburant vert » pourtant vendu 0,80 ? le litre, alors que le Super 95 est à 1,10 ? et le diesel à 1 ?.

Interrogé, le propriétaire d'une Saab Biopower break s'explique : « Trop cher. » Trop cher ? « Oui, avec de l'éthanol, la voiture consomme 30 % de plus. Je perds de l'argent. Et puis l'hiver, ça démarre moins bien », argumente Christer, 62 ans, en saisissant le pistolet vert du Sans-plomb 95.

750 points de vente

Voilà trois ans que le biocarburant a pris son envol en Suède. Le constructeur américain Ford avait essuyé les plâtres en commercialisant, à la fin des années 1990, un modèle Focus fonctionnant à l'éthanol. Quand Saab, deuxième constructeur suédois, s'est intéressé à la technologie, les groupes de distribution du carburant ont tendu l'oreille. Et, pour ne pas louper le coche, se sont mis à augmenter le nombre des points de vente. Aujourd'hui, la Suède en compte 750, essentiellement le long des grands axes de circulation. Une station-service comme 0KQ8, à Stockholm, annonce 10 % de son chiffre d'affaires avec l'éthanol. « En un an, ça a doublé », se félicite Göran Andersson, le gérant. Shell totalise 110 pompes et en prévoit 170 à la fin de l'année.

Certes, le nombre de voitures équipées d'une carburation leur permettant d'avaler indifféremment de l'essence ou de l'éthanol (dans le même réservoir, c'est une des grandes forces du procédé) reste marginal : dans les 70 000, moins de 2 % du parc automobile suédois. Mais il ne cesse d'augmenter. Ainsi, Saab vend 80 % de ses modèles 9.5 en version Biopower et présente au Salon de Genève une 9.3 qui utilise la technologie. À Stockholm, les bus roulent « vert ». Surtout, le numéro 1, Volvo, après l'avoir boudé, s'y est mis à son tour avec trois modèles flex-fuel dans sa gamme.

Des aides fiscales

Pourquoi parler de ralentissement, alors ? Parce qu'être propriétaire d'une voiture « flex-fuel » ne veut pas dire que l'on la fait forcément rouler à l'éthanol. Certes, l'option a un coût : un millier d'euros pour la Saab 9.5, par exemple. Mais, si c'est une voiture d'entreprise, celle-ci a droit à un petit cadeau fiscal. En outre, des places de parking gratuit, la nuit, sont prévues. Et surtout, au printemps prochain, quand, pour diminuer la pollution, l'entrée en voiture dans Stockholm sera devenue payante, chaque automobiliste roulant au carburant bio économisera les 60 couronnes (5,5 ?) de droit d'accès.

En attendant, le Suédois a beau avoir la fibre écologique, il regarde d'abord son porte-monnaie et rechigne à acheter un carburant qui, même s'il rejette 80 % de gaz carbonique en moins et augmente de 20 % la puissance du moteur, est devenu trop cher ces derniers mois. « Depuis fin 2006, les ventes plafonnent », admet-on chez Shell. Ce coup de froid pourrait n'être, cependant, que passager. Le gouvernement a promis d'alléger les taxes sur l'E85. Pour le moment, tout l'éthanol consommé est importé du Brésil. Mais des essais sont en cours pour utiliser la cellulose du bois, une des principales ressources du pays.

Marc MAHUZIER.