Bonus écologique : ce qu'il ne dit pas

Instauré fin 2007, il répond à un souci sur l'urgence climatique. Mais ne s'intéresse qu'au CO2 sans tenir compte d'autres pollutions.

Sur quoi est établi le barème du bonus-malus écologique ?

Sur les rejets de dioxyde de carbone. C'est un gaz à effet de serre, qui favorise le réchauffement climatique. Il est donc néfaste à brève échéance pour nos conditions de vie sur terre. Mais ce n'est pas un gaz toxique, au sens exact du terme, c'est-à-dire nuisible à notre santé.

Fait-il l'impasse sur les autres rejets à l'échappement ?

Oui. Et c'est là sa faiblesse. Car les voitures émettent aussi d'autres polluants qui, eux, sont directement nocifs pour notre santé. Ils ne sont pas du tout pris en compte par le bonus écologique. Par exemple, les oxydes d'azote, irritants et mauvais pour nos poumons, et les hydrocarbures imbrûlés vraisemblablement cancérigènes.

Se montre-t-il parfois décalé par rapport à un bilan pollution plus global ?

Oui. La seule prise en compte des rejets de CO2 fausse en partie la donne. Certes, jamais une voiture très bien placée en émissions de gaz carbonique ne sera exécrable quant à ses rejets d'oxyde d'azote. Mais certaines voitures - notamment les petites diesels - peuvent recevoir un fort bonus et présenter un bilan pollution par ailleurs médiocre.

Est-il possible de dresser un classement « écologique » des voitures d'après leurs seuls rejets de gaz carbonique ?

Non. Si vous mettez en regard les niveaux de bonus des voitures et leurs rejets de divers gaz polluants, il y a une discordance. Le classement sera loin d'être le même suivant votre critère de départ. Par ailleurs, dans certains cas, le système du bonus actuel peut se montrer contre-productif. Notamment pour certains diesels.

Y a-t-il une spécificité pour les moteurs diesel ?

Parfois, oui. Par nature, un moteur diesel consomme peu. Il est donc très bien placé en rejets de CO2 et, du même coup, avantagé par le bonus, qui récompense majoritairement les modèles diesel. Mais ces moteurs émettent, entre autres polluants nuisibles, des « particules » : de tout petits résidus de combustion nocifs pour nos voies respiratoires.

Depuis 2000, existe le filtre à particules : il élimine jusqu'à 99 % de ces rejets. Mais il n'est pas de série sur tous les diesels. Et il accroît légèrement la consommation : + 0,2 l/100 km. De quoi, parfois, pénaliser un modèle selon le système du bonus-malus. Alors que son bilan écologique global sera meilleur.

À quoi correspond le bonus de 5 000 € ?

Pour l'instant, à... rien. Ces 5 000 € de bonus sont accordés aux voitures rejetant moins de 60 grammes de CO2 par kilomètre. En l'état actuel des connaissances, aucune voiture avec un moteur classique ne peut atteindre ce niveau de CO2, loin s'en faut. Donc, ces 5 000 € ne peuvent être accordés que si vous achetez une voiture électrique. Mais là, pour l'heure, il n'y en a aucune proposée à la vente en France. La première n'arrivera pas avant fin 2010 ! Cela aussi, c'est une petite cachotterie du bonus...

Jean-Rémy Macchia, Ouest-France