Biocarburants : le gouvernement lance le projet BioTfuel

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Publié le: 09/10/2009 - Mis à jour le: 07/04/2015
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Le gouvernement s'apprête à lancer l'expérimentation à grande échelle des agrocarburants de deuxième génération, avant même d'avoir tiré le bilan de la première, décriée pour ses impacts sur l'environnement et l'utilisation de terres agricoles.

Le conseil d'administration de l'Ademe, l'Agence pour le développement et la maîtrise de l'énergie, vient de valider un plan de développement des agrocarburants de 2e génération baptisé BioTfuel, d'un montant de 112 M d'euros.

Produits à partir d'herbes et de résidus agricoles et forestiers, la 2e génération, qui utiliserait davantage de variétés de plantes, ne se substituerait pas a priori à des cultures alimentaires.

Selon un document "confidentiel" de l'Ademe dont l'AFP a obtenu copie jeudi, confirmant ainsi des informations parues dans le quotidien Les Echos, ce plan vise la fabrication de « biocarburant de type biogaz et biokérosène en 2015 ».

Le projet prévoit la construction de deux sites industriels, dont un à Compiègne, l'autre sur "un site" de Total, qui a confirmé, dans un communiqué, son « intérêt à prendre une part active » dans le projet.

Le groupe pétrolier, qui devrait apporter plus de 28 M d'euros - et en recevrait 7 M de l'Ademe- fait partie du consortium réuni pour conduire les expérimentations, comprenant notamment l'Institut français du pétrole (IFP) et le Commissariat à l'énergie atomique (CEA), Sofiproteol (Etablissement Financier de la Filière des Huiles et Protéines Végétales) et le groupe industriel allemand Uhde.

L'Ademe, qui s'est refusée jeudi à tout commentaire sur le sujet, apportera une aide de 30,06 M d'euros et la région Picardie, 3,2M.

BioTfuel vise un rendement de 30% au niveau expérimental et un minimum de 20% au plan industriel : soit 1 Mt de matières sèches pour produire 200.000 à 300.000 litres de carburant.

« Il s'agit bien d'une expérimentation », insiste Michel Dubromel, responsable du réseau Transports de la fédération France Nature Environnement (FNE). « Mais le principe du coup parti nous gêne : on met la charrue avant les bœufs
Il s'inquiète notamment du transport de grandes quantités de matières premières jusqu'à leur site de traitement industriel.

Au sein du gouvernement, notamment au ministère du Développement durable, la gêne est palpable faute de pouvoir répondre à cette question.

L'Ademe a bien été chargée d'une évaluation des impacts des agrocarburants de 1e génération ; après un premier rapport décrié, une seconde expertise lui a été commandée mais sa publication se fait toujours attendre, laissant libre cours aux spéculations.

Pour Patrick Sadones, de la Confédération paysanne, « le gouvernement met le champignon sur la deuxième génération car le rapport va montrer que la première génération est nulle ».

« Si le bilan était bon, on ne se serait pas dépéché », suspecte également Arnaud Gossement, porte-parole de FNE. Le "scandale", ajoute-t-il, c'est aussi de lancer la 2e génération « sans avoir procédé à une étude d'impact » préalable.

En 2008, l'expert Energies renouvelables de l'Ademe, Jean-Louis Bal, mettait déjà en garde contre les effets pervers des biocarburants, même de seconde génération. « Si on convertit des prairies ou pire, une forêt, qui stockaient des quantités considérables de CO2, soudain relâchées dans l'atmosphère, le bilan devient catastrophique ».

(Source : Anne Chaon, AFP)