La longue grève d'Aulnay freine Citroën

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Publié le: 29/03/2007 - Mis à jour le: 08/10/2019
Ils gagnent autour de 1 300 € net par mois. Ils en veulent 300 de plus. Depuis un mois, les grévistes de Citroën, à Aulnay, n'en démordent pas.

Un mois de grève et toujours l'impasse. L'usine PSA d'Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), qui assemble les C2 et C3 de Citroën, reste perturbée par un conflit au long cours à l'issue incertaine. Malgré le recours à des ouvriers des autres usines du groupe pour pallier les absences, Aulnay a déjà perdu la fabrication d'environ 10 000 voitures. En dépit de la médiation récente du préfet, les positions restent bloquées.

D'un côté, les quelque 400 à 500 grévistes (sur 5 000 salariés) s'arc-boutent à un cahier revendicatif assez radical symbolisé par une exigence de 300 € net par mois. « On serait 2 000 grévistes s'il n'y avait pas les pressions des petits chefs », assure Philippe Julien, délégué CGT. De l'autre, la direction, qui constate que la grève ne fait tache d'huile, se mure derrière un accord salarial d'entreprise, signé à la fin février, que seule la CGT n'a pas paraphé. Il garantit notamment, selon elle, 1 300 € mensuels net à un jeune ouvrier débutant.

Les loyers pèsent lourd

Les salariés embrayent sur le mouvement sans même attendre le feu vert syndical, reconnaît Philippe Julien, responsable CGT du site. Nombre de jeunes grévistes de cette usine, qui compte 40 origines ethniques différentes, ne sont d'ailleurs pas syndiqués.

« Les problèmes s'accumulaient depuis trop longtemps » : c'est comme un leitmotiv. Karim, 35 ans, non syndiqué : « J'ai dix ans de boîte, dont deux ans comme intérimaire. J'étais soudeur professionnel. On m'a transformé en polyvalent, ce qui m'oblige à occuper un nombre de postes impossible pour espérer une augmentation. Ma femme ne travaille pas. Je gagne 1 300 € net dont 550 vont au paiement d'un loyer pour un appart de 60 m2 dans le XXe à Paris. »

Amadou, 28 ans, non syndiqué, de souche sénégalaise. Première grève. « On nous parle de modèle social, mais, ici, il y a une discrimination insupportable. On m'a ramené à la chaîne, malgré ma qualification de mécanicien, alors que je faisais bien mon travail, contrairement à d'autres qui ont été promus et qui gagnent 1 600 €, là où je suis à 1 300 pour un loyer de 500 € et pour lequel j'ai deux mois de paiement en retard. »

« La discrimination, c'est tout à fait vrai, je l'ai constatée, moi, sur la demande de formation », opine Wilkens, 27 ans, CFDT, agent de production. Haïtien d'origine, première grève. « Je gagne, selon les mois, autour de 1 200 € net avec les primes. Ma femme ne travaille pas. Elle attend un enfant. Je paie 400 € de loyer au Bourget pour 41 m2. On n'arrive pas à vivre correctement. » « Partout on vous demande, au minimum, un salaire trois à quatre fois supérieur pour vous louer », commente amèrement Ouhna, de Sud. « Ce n'est pas possible ici ! »

Paul BUREL.